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Les impacts des violences conjugales sur la santé des victimes adultes et enfants

Emission EJE SQUARE n°2


Découvrons « les conséquences psychotraumatiques des violences : la sidération, la dissociation, la mémoire traumatique » expliquées par la psychiatre et psychothérapeute Muriel SALMONA dans une de ses vidéos publiées sur youtube.


« Les victimes de violences psychologiques ne sont pas identifiables au premier regard. Elles ne le portent pas sur le visage. On peut dire d’elles : « pourtant elle avait l’air d’aller si bien… Jamais je n’aurais imaginé… ». Elles sont jeunes ou vielles,

riches ou pauvres. Elles travaillent, ont des postes à responsabilité, dirigent des sociétés ou y sont employées. Elles sont à la retraite, sans emploi, encore étudiantes ou mères au foyer. Leur physique ne compte pas. Elles se trouvent à côté de chez vous, dans votre ville, dans votre rue, parfois dans votre famille. Elles sont sans cicatrice visible, sans blessure apparente. Elles sont silencieuses ou bavardes, tristes ou joyeuses. Elles sont, parce qu’elles sont en vie. Mais elles ne vivent pas. Elles survivent ».


Anne-Laure BUFFET : Victimes de violences psychologiques : de la résistance à la reconstruction.


Dans un contexte de violences conjugales, l’emprise est telle que la victime n’est souvent pas en mesure de partir de son propre fait. Tributaire généralement d’une basse estime d’elle même, d’un manque réel de confiance en soi, d’un manque ou même l’absence d’amour de soi, elle ne se considère pas en capacité, de manière consciente ou inconsciente, de changer ou d’amorcer un changement dans sa vie. Comment faire seule? Qu’est-ce que je vais devenir? Où aller? Et mes enfants? Avec quel argent? L’avenir proche paraît très insécurisé. La peur de ne pas y arriver, la peur de l’inconnu, la peur des représailles, la culpabilité, la honte, entre autres,… empêchent d’avancer. L’isolement instauré par l’auteur des violences durant la relation est loin de favoriser un quelconque départ. Par conséquent, la victime continue de supporter ces violences conjugales, qui la détruisent à petit feux.


La psychothérapeute américaine Robin NORWOOD, dans son ouvrage « Ces femmes qui aiment trop » questionne : « pourquoi trouvons-nous si difficile de rompre une relation, de renoncer à un compagnon qui nous fait péniblement faire toutes les figures de ce ballet destructeur? La raison en est simple: plus nous trouvons difficile de mettre un terme à une liaison qui nous est néfaste, plus elle mobilise d’éléments pénibles associés aux expériences que nous avons vécues dans notre enfance » (p.211)


Elle explique aussi que « si la relation que nous avons eue avec nos parents était une saine relation affective où s’exprimait l’amour, l’intérêt et l’approbation, lorsque nous sommes adultes, nous nous sentons à l’aise avec les gens qui engendrent un sentiment comparable de sécurité, de chaleur humaine et de dignité personnelle. De plus, nous aurons généralement tendance à éviter les gens, qui, par leurs critiques et leurs manipulations, nous amoindrissent à nos propres yeux. Nous ressentirons de l’aversion pour leur conduite. Toutefois, si nos parents nous ont traitées de façon hostile, critique, cruelle, manipulatrice, autoritaire, servile, ou de toute autre façon semblable, voilà ce qui nous semblera « correct » quand nous rencontrerons quelqu’un chez qui se manifestent - même très subtilement - des traces de ces attitudes et de ces comportements. Nous nous sentirons bien avec des gens qui suscitent en nous d’anciens types de relations malsaines, et peut-être contraintes, mal à l’aise, avec des gens plus gentils, plus doux, plus sains. Ou encore, nous serons tout simplement ennuyées par des personnes plus saines, parce qu’il n’y a pas de défi de les rendre heureuses ou de gagner leur affection ou leur appui. L’ennui cache souvent un sentiment diffus ou aigu de malaise, que les femmes trop aimantes ressentent lorsqu’elles sont privées de leurs rôles coutumiers : aider, espérer, mieux veiller au bien d’autrui qu’au sien propre » (p. 84-85).


Nous avons donc besoin de nous sentir transportées par l’incertitude, la douleur, la déception et le combat pour sentir que nous sommes en vie ». (p. 85).

Robin NORWOOD préconise dix étapes à appliquer, à mettre en oeuvre pour sortir de ce qu’elle appelle le « marécage », ce cercle vicieux dans lequel est emprisonnée la victime. Ce sont 10 étapes « simples mais pas faciles pour autant ». Elle les énumère dans l’ordre chronologique le plus courant : (p. 274 à 318)


1) Chercher de l’aide : emprunt d’un livre ; rendez-vous avec un thérapeute ; faire partie d’un groupe pour l’amélioration de soi et faire l’effort d’y aller; se rendre à un centre de consultation ; contacter la police

En fait, chercher de l’aide signifie « faire quelque chose », agir, poser un premier geste, prendre une initiative.


2) Faites de votre guérison une priorité vitale : pour la première fois de votre vie, peut-être, vous vous sentez véritablement importante et suffisamment digne de vous occuper de vous même.


3) Trouvez vous un groupe de soutien formé de personnes compréhensives qui se trouvent dans votre situation: c’est ici que débute le développement de l’acceptation de soi, une condition absolument vitale de votre guérison.


4) Développez votre vie spirituelle par la pratique : vous êtes disposée à patienter, à vous ouvrir, à attendre qu’on vous conseille; apprenez à renoncer à la peur (avec les « que se passe t’il si…? ») et au désespoir (avec les « si seulement… ») et à les remplacer par des affirmations positives au sujet de votre vie.


5) Cessez de diriger et de contrôler les autres : cela signifie être détachée ; cela implique entre autres choses, que vous abandonniez votre rôle de « personne secourable »


6) Apprenez à ne pas vous laisser prendre « aux jeux » : lorsque vous jouez au jeu du sauveur-persecuteur-victime, c’est un peu comme si vous faisiez une partie de ping-pong. Vous renvoyez la balle quand elle vous arrive. Il importe maintenant que vous développiez de nouveaux moyens pour entrer en communication avec vous-même et avec les autres.


7) Envisagez courageusement vos problèmes et vos défauts:

Ayant abandonné les jeux et renoncé à diriger et à contrôler les autres, vous pouvez vous attaquer maintenant à vos propres problèmes, parce que rien ne distrait plus votre attention en ce qui a trait à votre propre existence, à vos ennuis et à vos souffrances. Cela signifie également que vous scrutez de très près votre présente existence, pour en dégager à la fois ce qui vous valorise et ce qui vous gêne ou vous rend malheureuse. Epluchez tous les bons et mauvais souvenirs, les réussites, les échecs, les occasions où vous avez été blessée et celles où vous avez blessé. Une fois engagée dans ce processus, ne vous arrêtez pas avant d’avoir fait une exploration aussi complète que possible, et par écrit.


8) Cultivez ce qui cherche à s’épanouir en vous: vous épanouir consiste à vous consacrer aux activités qui vous intéressent.


9) Devenez « égoiste »

Votre bien-être, vos désirs, votre travail, vos plans et vos activités viennent en premier et non en dernier, avant et non après que les besoins de tout le monde ont été satisfaits.


10) Partagez avec les autres les expériences que vous avez vécues et ce qu’elles vous ont appris.


Il est plus que prépondérant et urgent de protéger la femme victime de violences conjugales, et de protéger les enfants lorsque celle-ci est maman, parce qu’en effet, les conséquences des violences conjugales sur l’enfant et son développement sont dramatiques. Non seulement l’enfant doit supporter les violences faites à l’encontre de sa mère, mais il doit aussi supporter les violences qui lui sont également faites par ce même bourreau.


L’émission INFRAROUGE diffusée sur FRANCE 2 le 26 novembre 2019 a proposé un documentaire « Enfants de femmes battus, les oubliés ». On y retrouve des témoignages d’adultes qui ont été enfants victimes de violences conjugales et de violence directement à leur encontre.


Marie DRUCKER questionne justement : « Comment se construire au milieu des coups et des insultes? ». On les appelle les « oubliés », parce que longtemps on a pas donné d’attention et d’importance à ce que les enfants vivent et ressentent dans ces contextes douloureux.


Vous pourrez trouver une autre vidéo de Muriel SALMONA relative à une conférence intitulée « Les violences faites aux enfants », dont vous trouverez le lien sur la page Wix de l’émission EJE SQUARE. Les violences faites aux enfants est la première cause de mortalité dans l’enfance, l’impact neurologique, autrement dit au niveau du cerveau, impact la santé physique et psychique de celui-ci.


Elle insiste sur le fait que les violences faites aux enfants est un problème de santé publique majeur.

Je la rejoins complètement lorsqu’elle dit que « protéger les enfants, c’est changer le monde ».


En effet, son site internet mémoiretraumatique.org revient en détail sur les conséquences des violences faites aux femmes ainsi que celles des violences subies par les enfants.

Ces enfants, je cite : « développeront des conséquences psychotraumatiques graves et durables sur leur santé physique et psychique avec une grave souffrance mentale, des retentissements sur leur développement psycho-moteur, leur scolarisation, leur socialisation et leur vie affective à long terme ; ils auront un risque d'être à nouveau victime de violences tout au long de leur vie, et un risque également important de présenter des conduites agressives, des conduites à risque, des conduites délinquantes et des troubles psychiatriques à l'âge adulte (Rossman, 2001).

40 à 60 % d'hommes violents avec leurs partenaires ont été témoins de violences conjugales dans l'enfance.


Les enfants traumatisés par des violences conjugales présentent davantage de problèmes de santé : retard de croissance, allergies, troubles ORL et dermatologiques, maux de tête, maux de ventre, troubles du sommeil et de l'alimentation, et ils sont plus souvent victimes d'accidents (8 fois plus d'interventions chirurgicales). Ils présentent fréquemment des troubles de l'adaptation : phobies scolaires, angoisse de séparation, hyperactivité, irritabilité, difficultés d'apprentissage, et des troubles de la concentration. Ils présentent fréquemment aussi des troubles du comportement, 10

à 17 fois plus que des enfants dans un foyer sans violence, dont des comportements agressifs vis à vis des autres enfants, 50% des jeunes délinquants ont vécu dans un milieu familial violent dans l'enfance.


Les troubles psychotraumatiques peuvent représenter pour ces enfants un risque vital, particulièrement à l'adolescence avec une augmentation du risque d'avoir un accident mortel et une augmentation importante du risque suicidaire (x 20).


Les enfants sont particulièrement exposés à des troubles psychotraumatiques lors des violences conjugales du fait de leur vulnérabilité, de leur dépendance affective et physique, de leur immaturité psychique et physiologique, de leur impuissance, et de leur situation d'être en construction et en devenir. Comme les enfants témoins de violences conjugales vivent dans un climat de grande insécurité et de terreur, toute leur énergie passe dans la mise en place de stratégies de survie et de défense (…).


Les enfants subissent les violences conjugales souvent dès leur vie fœtale. Dans 40 % des cas les violences conjugales commencent pendant la grossesse et peuvent être plus graves pendant la grossesse pour 2 femmes sur 3 ; 4 fois plus de femmes signalent de très mauvais traitements pendant la grossesse (coups, menaces avec armes, agressions sexuelles). Les femmes qui subissent des violences conjugales ont un moins bon suivi de leur grossesse et plus de facteurs de risque (HTA, tabagisme, prise d'alcool).


Le fœtus se retrouve alors en danger, il est exposé à un stress physiologique important, avec des retentissements cardio-vasculaires et neurologiques, à un risque d'avortement (2 fois plus de fausses-couches chez les femmes victimes de violences conjugales), à une mort in utero par décollement placentaire ou rupture utérine, à une hémorragie fœto-maternelle, à un accouchement prématuré (37 % d'augmentation de risque), une souffrance néo-natale, à un petit poids de naissance (17 % d'augmentation de risque).


Après la naissance, le nouveau-né se retrouve doublement en danger , directement par la violence du père qui peut s'abattre sur lui (dans 3 cas sur 4 de violences conjugales), et indirectement par les violences que la mère continue à subir (dans 90 % des cas les violences conjugales continuent après l'accouchement) qui vont retentir sur les soins donnés à l'enfant et sur le lien mère-enfant, et être traumatisantes pour l'enfant. En effet le nouveau-né est très sensible aux effets de la violence qui l'entoure et il va développer d'importants troubles psychotraumatiques qui risquent de le mettre encore plus en danger : les pleurs continuels, les troubles importants du sommeil et de l'alimentation, le retard de développement psycho-moteurs peuvent être des facteurs de risque supplémentaires de maltraitance (bébé secoué, étouffement, etc.).


L'enfant grandit alors dans un climat d'insécurité, et développe une grande détresse face aux violences, face à son incompréhension et son impuissance, face à la menace de voir mourir un de ses parents, de mourir lui-même, ou d'être abandonné. L'enfant est d'autant plus exposé à des conséquences psychotraumatiques que les violences conjugales ont commencé très tôt, qu'il est l'aîné ou qu'il est enfant unique, que les violences sont graves et fréquentes, que l'enfant s'interpose et subit des violences directes. L'enfant va être d'autant moins exposé à des conséquences psychotraumatiques que sa mère (ou le parent victime) a des comportements de soutien et de compréhension face à sa souffrance et qu'elle est chaleureuse avec lui (qu'elle puisse parler avec l'enfant, le rassurer) et qu'elle lui donne des repères. Une bonne estime de soi et de bonnes compétences sont un facteur de protection (importance du rôle de l’école) ».


Aux femmes victimes de violences conjugales, appelez à l’aide. C’est de votre vie et de la vie de votre enfant dont il s’agit. Ne restez pas sans voix. Osez parler, osez agir.


Contactez le 3919 Porter plainte au commissariat, faites vous accompagner Frapper aux portes des structures pouvant vous soutenir et vous accompagner dans vos démarches comme le CIDFF et les associations SOLFA.


N’oubliez pas, vous êtes votre priorité. Nourrissez votre for intérieur de ce qui vous fait du bien, qui vous renforce.


C’est en prenant soin de vous que prendrez soin de votre enfant.


RÉFÉRENCES





Références musicales de cette émission



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